lundi 29 septembre 2008

Fouiller les poubelles, à la recherche du moindre objet vendable. Tel est le métier de centaines de personnes, qui composent le premier maillon d’une chaîne de recyclage à la marocaine.


Il vous arrive souvent, le matin, en vous rendant sur votre lieu de travail, de pester contre le spectacle de poubelles renversées et de trottoirs jonchés d'ordures. Quelques injures et un monologue sur “le manque de civisme chez les Marocains” plus tard, vous passez votre chemin. Sans vous douter que derrière cette scène se cache un
véritable système de survie économique, auquel participent des dizaines, voire des centaines de personnes. Des gens qui ont choisi pour “métier” de fouiller les poubelles, à la recherche du moindre objet vendable, et qui sont le premier maillon d'une chaîne de recyclage à la marocaine. Depuis quelques années, Abdou et Mustapha exercent le métier de chiffonnier, “mikhali” dans le langage courant. Le premier, âgé d'une vingtaine d'années et vivant à Aïn Aouda, commence ses journées aux aurores. Direction : quartier Hassan, à Rabat. L'expérience aidant, il connaît désormais par cœur les ruelles où se trouvent les poubelles les “mieux garnies”, où il est possible de trouver le plus d'objets récupérables.

Défendre son territoire
“Chacun a son propre territoire, qu'il doit défendre contre la concurrence, nous explique Abdou. Avec un gain de 60 à 70 DH par jour, on ne peut pas se permettre de le partager !”. Du coup, il n'est pas rare que de violentes disputes éclatent entre chiffonniers rivaux. Ces derniers doivent également livrer une course contre la montre : pas question d'arriver en retard, c'est-à-dire après le passage du camion d'éboueurs. “Si tu veux gagner ta journée, tu as intérêt à connaître leurs horaires de passage”, prévient Abdou, qui ajoute : “Certains chiffonniers vont jusqu'à verser un petit bakchich aux policiers pour qu'ils les laissent travailler en paix”.

Son compère, Mustapha, 24 ans, a quant à lui choisi le quartier huppé de Hay Ryad, à Rabat, comme zone de prospection. Et pour cause : “C'est bien évidemment dans les quartiers riches que l'on déniche les meilleures affaires. Vous serez étonnés de savoir ce que ces gens-là osent jeter !”, s'exclame-t-il. Le programme des tournées est savamment huilé. Si, les jours de semaine, le duo accorde sa préférence aux quartiers résidentiels, durant le week-end, il jette son dévolu sur les bars et restaurants de la capitale, à la recherche de bouteilles vides et de canettes, le verre et l'aluminium étant très demandés sur “le marché”.

Le marché de la récup’
C'est justement vers “le marché” que se dirigent les deux hommes une fois bouclée leur tournée : la décharge de Akreuch, dans la région de Rabat-Salé. C'est là qu'ils procèdent au tri du butin de la journée, avant de l'entasser dans des sacs distincts, séparant le plastique du verre et des objets métalliques… “Le cuivre, le fer et l'aluminium sont les plus recherchés par les acheteurs. Le verre et le carton trouvent également preneur, mais ça rapporte moins”, précise Abdou. Les acheteurs sont des grossistes de la récupération, souvent issus des bidonvilles voisins. Equipés de bascules, ils rachètent au kilo les sacs de “marchandise”, avant de se lancer dans une seconde opération de tri. Le “produit final” est ensuite revendu à des usines ayant pignon sur rue. “La plupart des marchandises vont dans des usines de Casablanca, qui procèdent à leur recyclage, explique un grossiste. Il n’y a que les canettes qui vont à l’étranger, parce qu'il n'y a pas d'usine de recyclage d'aluminium au Maroc”. Pendant que notre grossiste négocie le prix d'un sac, des jeunes accourent vers le monticule d'ordures déchargé par un camion-poubelle. Parmi eux, Saïd, 18 ans. Habitant du bidonville voisin, il connaît cette déchetterie depuis son plus jeune âge, comme c'est le cas de ses quatre frères. Et tous ont fini par en faire leur lieu de “travail”. Faisant tourner dans sa main un crochet, son outil de prospection, il dit n'avoir aucune honte de son métier. “Je veux vivre à la sueur de mon front. Je ne veux ni voler, ni agresser les gens. Certes, je gagne bien peu, mais c’est toujours à moi”. Envers et contre tout, Saïd continue à s'accrocher aux études (il est élève de 9ème dans un collège public). Une fois ses heures de travail bouclées, il prendra une douche, se changera et ira en taxi “informel” au centre-ville de Rabat, où il s’installera à une terrasse de café. Comme n'importe quel jeune de son âge. Ou presque.

samedi 13 septembre 2008

Ramadan La contrebande vole la vedette


Des mains chargées de sacs en plastique débordant de tous genres de marchandises sans oublier l'odeur de l' huile de friture et du miel mêlée aux fumées des véhicules qui empruntent le Bd Mohammed VI. On est dans l'un des plus grands «souks» de Casablanca, la veille de Ramadan.

Un marché où les «Bidawis» s'alimentent de tout ce qui est nécessaire pour ce mois sacré: c'est le fameux «Derb Soltan» avec toutes ses ruelles débordantes de marchandises et ses grands et petits magasins entassés. Des produits de grande marque, de contrebande et de gamme moyenne sont étalés sur des tables en bois ou exposés par des «ferrachas» à même le sol. Il y en a pour tous les budgets et pour tous les goûts.



De l'huile de table made in Morocco au fromage de l'Espagne ou le thé de la Chine, tout se vend à «Derb Chamal» ou «Zenkat Sebta» comme certains l'appellent. Il faut dire que la vente des produits de contrebande est une activité périodique qui prolifère pendant le mois du Ramadan. Ce gagne-pain périodique permet aux jeunes des quartiers populaires de s'approprier une somme d'argent non négligeable le temps d'un mois.

«Je préfère travailler au lieu de rester les bras croisés, sans occupation ni rendement pendant cette période de grande consommation», affirme un vendeur de jus à Derb Soltan. Interrogé sur la provenance de sa marchandise, ce jeune commerçant a préféré garder le secret du métier. «Moi-même je ne connais pas l'origine de ce produit. C'est un ami qui me le fournit», nous a-t-il expliqué. Si ce jeune commerçant préfère garder le silence, Mohamed, un vendeur de flans chimiques, installé près de lui, nous donne quelques explications. «Nos fournisseurs sont des usines qui fabriquent des produits alimentaires, installées à Casablanca, Agadir, Settat… Et pour liquider leurs stocks, elles nous les revendent.

En plus, comme vous pouvez le remarquer, on a de la marchandise provenant de Sebta et de Mellilia». En effet, on lit sur les boites de marchandises vendues à «Derb Chamal» que par exemple les tomates conservées proviennent d'une usine de Casablanca, les boites de sardine viennent d'Agadir, un type de margarine de Settat… «Les gens se soucient peut de l'origine des produits.

mercredi 10 septembre 2008

Chronique TV: un cheveu dans la soupe



Rien de nouveau dans les allées des deux chaînes hertziennes, le mets ramadanesque est toujours aussi indigeste. Le couple cathodique semble définitivement perdu dans le trou noir de son incapacité à produire de l’intelligible.

Difficile en effet de déceler du sens dans le brouhaha de la programmation casée dans les tranches horaires présentées comme les plus précieuses de l’année.


En guise de rupture du jeûne, 2M et Al Aoula nous proposent, pour une énième année consécutive, une rupture des neurones concoctée par ces fameuses sitcoms, ce concept venu d’ailleurs qui a eu la très mauvaise idée de traverser la Méditerranée.

Annoncés comme « un duo de rire qui fera des étincelles », Abdelkhalek Fahid et Mohamed El Khiari, les deux malheureux héros de « Mbarek et Messoud », ont fini par exploser à la figure des téléspectateurs.

Articulée autour de la thématique populaire du « mauvais œil », la sitcom qu’ils fréquentent condense, en une trentaine de minutes, les clichés les plus puériles sur notre société. Côté Al Aoula, la devise est « on ne change pas une équipe qui perd ».

La chaîne a choisi de rappeler le groupe constitué autour de Mohamed El Jem pour alimenter de nouveaux épisodes de « Sir Hta Tji » qu’on aurait aimé rebaptiser « Sir o mat rja3ch », une série qui pourtant avait fait l’objet de vives critiques les années précédentes.

Embarqués dans des dialogues souvent insensés, les acteurs de ces sitcoms campent des personnages aussi saugrenus les uns que les autres.

Dommage pour certains d’entre eux comme Abdelkhalek Fahid condamné semble-t-il à dilapider son talent dans des scénarios qui n’ont ni queue ni tête. Mais qu’importe, la relève est assurée, la fabrique à médiocrité a été inventée..

Le moule de la production télévisuelle nationale, lui qui a le don d’inhiber les talents, a aujourd’hui l’audace de prétendre vouloir les révéler dans un concept récemment dédouané et vidé de sa substance, Comedia, votre nouveau cheveu dans la soupe de ce ramadan